L.A
n° 4 : le dénouement
De
la p. 93 « Il ne fera donc jamais nuit ? » à la fin
PBQ :
Un
dénouement tragique / qui ne dénoue rien / qui reprend les thèmes
de la pièce.
-
Un
trio infernal ou le couple impossible
A.
le couple Estelle / Garcin ne peut pas exister à cause de la
présence d'Inès :
-
Estelle
cherche désespérément l'amour, le
réconfort de Garcin :
apostrophe
« Mon
amour ! » l. 26 avec
le
possessif (s'approprie Garcin).
-
Mais Garcin la repousse verbalement
(« laisse-moi » l.28)
et
physiquement :
il s'éloigne d'Estelle dans deux
didascalies : « abandonne » l.9 et « repoussant »
l.27
-
l'antithèse « abandonne Estelle»
/ « s'approche du bronze » l.9-10 souligne l'éloignement
de Garcin, d'autant plus qu'il « caresse » le bronze, par
opposition à Estelle qu'il repousse.
-
Garcin s'adresse principalement
à Inès, et ne parle à Estelle que dans une négation l.28.
-
Garcin montre l'obstacle que constitue Inès l.29 : la
subordonnée de cause : « quand elle me voit »
explique l'impossibilité pour lui d'aimer Estelle.
-
Jeu sur les pronoms qui résume tout le
jeu des alliances de la pièce l.28, 29
: « O »,
« moi » (Estelle qui ne
compte pas + Garcin) puis « elle »,
« nous » (Inès + le couple)
puis
« je » + négation +
« tu »
(Garcin négation d'Estelle) puis
« elle », « me »
(Inès + Garcin) :
Estelle cherche à fusionner avec Garcin
(nous) mais présence d'Inès (elle) fait que le trio n'est jamais
réductible.
B.
Ils forment un trio, un tout
-
Les liens
se sont resserrés : ils se tutoient maintenant (ils sont nus les uns
devant les autres, se sont tout dit, n'ont
plus rien à sa cacher)
-
Nombreux mots ou tournures répétés
trois fois : « Morte ! »
(l.43),
énumération de trois termes « ni
le couteau, ni le poison, ni le
corde » (l.43-44),
« eh bien » répété à trois reprises (l.12, 31, 97)
- Adverbe
« ensemble » et pronoms
« nous » l.45 = les 3
personnages indissociables les uns des autres.
-
Estelle et Garcin reprennent exactement les
paroles d'Inès
l. 48 et 52 (« Pour toujours ») et reprennent également
son rire l.46, 47, 50, comme s'ils
devenaient les miroirs les uns des autres.
-
Les verbes de mouvements ne cessent de
rapprocher et d'éloigner les personnages (« abandonne »,
« la repoussant », « se précipite sur »),
jusqu'à la l.53 où ils sont unis dans un même pronom (« ils »,
sont sujet d'un même verbe d'action : « tombent assis »,
mais sont éclatés chacun de leur côté par le pronom « chacun ») :
ils sont à la fois ensemble et séparés, unis et en opposition.
-
Le
regard comme instrument de torture
A.
Le regard douloureux
-
La peur, l'angoisse du regard est exprimée par Garcin avec :
-
l'antithèse « toujours » / « jamais » :
effet d'insistance sur le fait qu'on ne peut pas échapper au regard.
-
La personnification
du regard qui apparaît comme un ogre : Garcin
se sent dévoré par les regards : « ces regards qui me
mangent... » l.18 = angoisse de la dévoration, de ne plus
s'appartenir, de disparaître dans un autre (dans le regard de
l'autre).
-
Le pluriel hyperbolique
« tous ces regards » répété
deux fois = comme s'il
était assailli,
-
L'interjection
« ah! » qui traduit à la fois la surprise et la peur,
-
La didascalie
« brusquement » (// référence à la scène
d'exposition, où G. avait peur que la situation lui saute dessus par
derrière p.17).
-
Le regard de l'autre empêche la mauvaise foi et le mensonge : « tu
me verras toujours » l.6 + « tous ces regards »
l.17 et 18, « elle me voit » l.29, « les
regardant » l.51 => Garcin ne peut pas faire semblant
d'aimer Estelle à cause d'Inès qui sait.
-
La didascalie de la l.55 : Garcin regarde les deux femmes, puis tous
les trois tombent assis sur leur canapé : comme si le regard de
Garcin les avait tués => le regard comme arme.
-
Le regard prend le dessus sur le rire : la dernière didascalie
= « ils cessent de rire et se regardent » l.55 :
c'est finalement le regard qui l'emporte
sur toute autre chose.
B.
Les conséquences de ce regard auquel on ne peut échapper ;
Regard = instrument de révélation
-
Garcin
frise la folie : « Je vous croyais beaucoup plus nombreuses »
/ restrictive « vous n'êtes que
deux » : comme s'il ne le découvrait que maintenant. Ces
regards lui pèsent tellement qu'ils lui paraissent multipliés.
-
Il a une prise de conscience (Inès
l'avait déjà affirmé autrement):
« L'enfer, c'est les Autres »,
expression qui résume à elle seule la pièce : l'enfer ne tient pas
à des instruments de torture physique, qualifiés
de « plaisanterie », c'est-à-dire qu'ils ne sont rien
comparés à la souffrance
psychologique infligée par « les Autres ».
-
Estelle utilise la violence physique, cherche à tuer Inès :
Interjection « Ah! » qui marque la rage + didascalie
« coupe-papier » et « plusieurs coups » l.32
=> première utilisation du coupe-papier = usage détourné de sa
fonction usuelle, mais inutilité de l'objet puisqu'il ne peut même
pas tuer.
Ce
désir de meurtre montre une chose importante : elle n'a pas
changé, ne changera jamais, restera une meurtrière pour l'éternité,
dans la mort comme dans la vie. C'est le regard d'Inès qui a permis
de révéler cela.
-
Inès est agressive : elle martèle l'adjectif « morte »
en criant (points d'exclamation), la didascalie l. 41 indique son
sentiment : « avec rage » ; elle se frappe elle-même,
imitant le geste inutile d'Estelle, pour montrer par l'acte ce
qu'elle dit avec des mots.
-
Un
dénouement sans fin ou Un destin figé à jamais
A.
L'éternité ou l'éternel recommencement
-
Tirade de Garcin qui fait écho à la scène d'exposition avec le
bronze, la cheminée, et les références aux représentations
populaires de l'enfer => circularité.
-Pourtant
Garcin a évolué : « je comprends » l. 14, par
opposition à sa naïveté du début « quelle plaisanterie ! »
: il a compris le sens de son enfer. Il se méprise lui-même de sa
naïveté de départ (« le soufre, le bûcher, le gril »)
: rire de mépris l.21
-Phrase
finale : « continuons » => enfer éternel, ils
continueront pour l'éternité
-Adverbe
« toujours » du début de l'extrait et repris par chaque
personnage en fin d'extrait : renforce
l'éternel recommencement.
-Le
coupe-papier qui ne coupe pas : métaphore
de la vie sans coupure, référence à
la scène d'exposition => référence aussi au « tu me
verras toujours » de Garcin. Objet hautement symbolique
- « Il
ne fera jamais nuit » l.2 = futur
+ adverbe « jamais » = éternité
B.
Un dénouement tragique
-
L'impossibilité d'agir : les objets ne fonctionnent pas
(coupe-papier ne tue pas)
-
Impossibilité d'agir sur son passé : « c'est déjà fait »
l.44, avec l'adverbe « déjà »
mis en évidence par l'italique. Mais
également impossibilité d'agir sur son présent et dans le futur.
-
Garcin, lui, se sent comme le bronze de Barbedienne,
immuable, figé pour l'éternité : il est un « en-soi »,
c'est-à-dire un objet qui ne peut plus changer, il est « réifié »
(= transformé en objet).
-« Tout
était prévu » l.15 : destin préfixé, non pas le destin de
sa vie (Sartre disait que l'homme était « condamné à être
libre »), mais le destin de sa mort.
- Le
pronoms « Ils » dans
« ils avaient tout
prévu » l.15 : on ignore qui
il désigne, une transcendance (=
puissance supérieure) => tragique
-Mais
la transcendante, peut aussi être désignée par « les
Autres » puisque majuscule à « Autres » =>
l'autre nous dépasse, nous possède, à la manière d'un dieu.
-
Le rire final : rire absurde, rire de désespoir ? Rire nerveux ? =>
le rire à trois, qui montre l'absurdité de la situation. Ou le
désespoir.
- « Continuons »
= renforce la dimension tragique, puisqu'ils vont continuer à
exister, sans rien changer, juste à être là, comme le bronze de
Barbedienne.
Aucune évolution possible : ils ne peuvent que continuer.
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