samedi 9 mars 2019

Critique : La Part de l'Autre


La critique de Nolwenn

La Part de l’Autre est un roman d’uchronie dont le personnage principal est l’un des plus grands tyrans de tous les temps, j’ai nommé Adolf Hitler. Célèbre pour ses horreurs sans nom, le dictateur sera l’objet d’un parallèle entre sa vie vécue et celle qui aurait pu changer le cours de l’Histoire si seulement il avait été accepté dans l’Ecole des Beaux -Arts de Vienne.
Ce roman est scindé en deux parties : la vie vécue et celle rêvée. A l’aide d’un double personnage, Adolf Hitler et Adolf H, le lecteur découvre la capitale de l’Autriche sous un autre jour. Vienne est décrite de long en large que cela soit pour peindre ses qualités ou ses défauts. On y découvre les fractures sociales et le monde de l’art au début du vingtième siècle. Plusieurs thèmes seront notamment abordés par l’auteur comme la découverte de la sexualité, l’homosexualité chez les peintres, ou encore l’antisémitisme naissant aux portes de la guerre. Pour Eric Emmanuel Schmitt, chaque thème sera l’occasion de noter les fractures qui feront d’un peintre déçu, un machiavélique tyran.
Parfois un peu perturbant, ce roman révèle un réel sens de la psychologie chez l’écrivain. En effet, le monde de la psychanalyse est assez présent avec l’apparition du père de cette médecine : Sigmund Freud. Le vrai Adolf Hitler suivra même une psychanalyse avec celui-ci. Avec cet écrit à double facette, l’auteur nous montre que l’homme est changeant et qu’il suffit d’un rien pour devenir profondément mauvais. Alors qu’Adolf H avoue échouer par manque de talents, Adolf Hitler reste, lui, convaincu de ses talents jusqu’à ce que cette part de l’autre dévore celle qui devait faire de lui un homme accompli. C’est dans ce mélange d’émotions parfois étouffant, notamment avec l’apparition de la lubie presque obsessionnelle d’Hitler pour Wagner, que le message de l’auteur nous paraît le plus flagrant : rien n’est joué, il existe toujours cette part de l’autre.
De plus, en lisant ce roman on ne peut qu’être poussé à poursuivre notre réflexion sur cette problématique en dehors de notre lecture : Hitler et les étapes qui ont construit sa vie sont reconstituées dans ce roman avec une vraisemblance effrayante. On comprend peu à peu la stratégie de l’auteur. Il ne cherche pas à pardonner l’impardonnable, il cherche seulement à peindre le côté humain de quelqu’un qui semble ne pas l’être. Ce côté humain épouvante beaucoup car il s’agit de montrer qu’Hitler avant d’être Hitler était quelqu’un qui se fondait dans la masse. Il n’était pas plus antisémite ou reclus qu’un autre, c’est la conjonction d’éléments diamétralement différents qui feront de lui ce qu’il est devenu.
Ce roman n’est pas des plus simples à lire et il est parfois déroutant pour un lecteur de parcourir une œuvre avec diverses anecdotes sur Adolf Hitler. C’est pour cela qu’il est important de le découvrir et d’y réfléchir. Il ne s’agit pas simplement de lire, il s’agit d’impulser une réflexion sur l’humain et sa capacité à pouvoir raisonner lorsqu’il est envahi par les émotions. Ce roman n’est certes pas hilarant, notamment à cause de la période évoquée et des thèmes abordés, mais les rares moments drôles sont exprimés avec finesse et permettent au lecteur de prendre une réelle bouffée d’oxygène.
Un excellent livre.

La critique de Meï

Un homme, deux destins.

Un sentiment, un regard, une journée, une année, voire une vie, tout peut changer. Rien qu'avec un « Et si..? ». Et si Edison n'avait pas inventé l'électricité ? Et si Pasteur n'avait pas découvert le vaccin contre la rage ?... Tant de possibilités, pour que le passé finisse par n'être que le résultat d'une seule issue, d'un futur imprévisible, dont on ne peut se demander le « et si ? » que lorsque l'on prend du recul.

Mais alors, et si Hitler était entré aux Beaux-Arts ? C'est ce que nous raconte Eric-Emmanuel Schmitt dans son roman La Part de l'autre. Tout commence le jour oú le vrai Adolf Hitler n'est pas accepté lors des concours d'entrée aux Beaux-Arts de Vienne. Déçu, pauvre et étudiant, il se retrouve donc à la rue. Mais alors qu'il s'en va, dépité, errant dans sa ville natale, une autre histoire se dresse en parallèle, celle d'un Adolf Hitler qui est admis par le jury des Beaux-Arts. S'ensuit alors le long chemin de celui dont on connaît l'histoire, et qui va peu à peu se renfermer sur lui-même ; chemin tortueux, sombre, où l'antisémitisme et la guerre dominent progressivement la voie de sa pensée. En parallèle, l'autre Adolf s'engage sur un chemin qui aurait pu changer toute une période de l'Histoire du monde, un chemin qui le mène à Freud, et au cours duquel il va découvrir les plaisirs et les déceptions de l’existence qui vont lui permettre de s'épanouir en peinture comme dans sa vie privée. On en vient presque à voir Hitler, ce dictateur, différemment. À éprouver une certaine compassion pour lui qui au début du roman est un homme avec de l'esprit critique, et qui devient un personnage froid et violent parce qu'au fond de lui-même il se sent seul et rejeté. Ce qu'il aurait pu ne pas devenir s'il avait eu une vie comme le « Et si... ? » de Eric-Emmanuel Schmitt.

Cette histoire retrace celle d'un personnage tourmenté, qui nous fait comprendre que chaque choix dans la vie d'un individu, quel qu'il soit, peu avoir un impact bien plus grand qu'on ne peut l'imaginer. Se dire qu'une seule et même personne, à un moment donné, a des opportunités pour devenir complètement différente, change la perception de notre quotidien. L'auteur nous invite alors à réfléchir sur nous-mêmes. Mais comment voir si nos choix sont les bons, nous qui ne pouvons pas prévoir le futur car il change constamment ?

Qui que l'on soit, nous avons déjà imaginé notre vie avec des « Et si..? ». Parce que l'Homme aime se poser des questions, se demander si sa vie aurait pu ou pourrait être meilleure, à la recherche de la perfection, il traque les meilleures solutions, mais elles ne sont pas toujours synonymes de raison.


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