mercredi 16 janvier 2019

Séquence Barrage, L.A 4 : la lettre aux agents cadastraux


L.A 4 : La lettre aux chiens du cadastre

p.238 (« Je suis vraiment très pauvre maintenant ») à p.240 (attention, édition Folio)

Comment, dans cette ultime lettre de la mère, le désespoir se transforme-t-il en révolte ?

Je vous propose deux plans légèrement différents, selon ce qui a été vu dans les différentes classes, mais qui reprennent exactement les mêmes arguments. 

Le plan A a le mérite d'évoquer le genre du texte (une lettre) mais l'inconvénient d'avoir un IB un peu trop étoffé.


Plan A :

I. La lettre désespérée

A. Une lettre intime et sincère
- pronoms personnels : « je » / « vous »
- instauration d’un dialogue avec l’agent : question l.2, dialogue imaginé au discours direct l.18 à 32 : « vous me diriez... » , « je vous répondrais... ».
- « Voyez-vous » + « mettez-vous à ma place » : formules plutôt d’oralité qui montrent une certaine familiarité entre eux
- Expressions familières : « quand on n’a rien à se mettre sous la dent » l. 52-53 ; formule de politesse officielle qui termine la lettre (« je vous prie d’agréer, etc. ») alliée à une restrictive familière (« quand même » l.55) = burlesque
- Dévoilement de sujets intimes : évoque ses enfants (« mon fils » ; « ma fille »), sa souffrance à l’idée du départ de son fils, sa pauvreté, ses insomnies (« je ne peux plus dormir » l.6) → comme si elle parlait à un proche.

B. Une tonalité tragique, sans espoir : solitude, échec, perte irrémédiable
* Pathétique dû à la pauvreté :
- hyperboles soulignant sa pauvreté : « vraiment très pauvre » l. 1, « tant de misère » l.3
- Pathétique : « l’argent que […] j’avais économisé sou par sou » l. 38
* Tragique lié à l’éclatement familial (et surtout à la perte du fils) :
- Tristesse infinie à l’idée du départ imminent de son fils : « tellement triste » l.5 + répétition «  mon fils […] va probablement me quitter pour toujours » l. 2-4, « que mon fils s’en aille pour toujours » l. 12, « que je presse mon fils de partir » l. 30 avec une gradation dans son activité à elle : au départ, elle subit le départ du fils, puis elle finit par le provoquer, comme quelque chose d’inévitable.
- indications temporelles « pour toujours » dans « me quitter pour toujours » l.4 et répété l.12 (en évoquant le départ probable de son fils)+ adverbe « jamais » dans « je ne les reprendrai jamais » l.43 (en évoquant son argent, sa jeunesse) → pas de retour en arrière possible, perte irrémédiable
- Comparaison avec la mort des enfants de la plaine (« de même que les morts d’enfants ne peuvent se reprendre » l. 41 : souligne le caractère irrémédiable de ces pertes.
- « je ne me sens plus le courage ni le droit » l. 4-5 : elle accepte (se résigne ?) désormais que ses enfants s’en aillent.
- interjection tragique « hélas » l.37
* Ironie tragique de l’absence d’espoir :
- constat désabusé dans la locution : « il faut bien vivre de quelque chose » l. 48-49 avec le pronom indéfini « quelque chose » qui apparaît comme dérisoire
- expressions d’inutilité : « ça ne sert à rien » l. 9, « à quoi bon ? » l.19, « que me restera-t-il à faire… ? » l.35 → comme si plus rien ne pouvait marcher, comme si la vie n’avait plus qu’à s’arrêter.
- Hypothèse à plusieurs reprises de l’absence d’espoir : « si je n’ai même pas l’espoir » l. 27-28, « si dans l’année qui vient je n’ai même pas cet espoir » l. 33, « si ce n’est pas de l’espoir » l.49
- Ces hypothèses sont suivies de solutions désespérées : « je donne tout de suite ma fille à un bordel » l. 29-30, « je presse mon fils de partir », « je fasse assassiner les trois agents du cadastre » l.31-32 → la mère est prête à renoncer à ce qu’elle a de plus cher au monde, ses enfants, son honneur, sa liberté.

C. La mère ressasse jusqu’à la folie
- Indicateurs temporels : « Ça commence à faire bien longtemps déjà » l. 6-7, « depuis le temps que » l.8
- polyptote « ressasser », « ressasse » l. 8 et 9
- « Je vous le répète » l.48
- des formules répétées : « des nuits et des nuits » l. 7-8 ; « ces choses » répété 3 fois l.8, 11, 13 ; « il faut que vous me donniez ces cinq hectares du haut qui entourent mon bungalow » l. 16, puis « il faut m’accorder ces cinq hectares » l.44-45 ; le nom « barrages » est répété à 5 reprises
- passage absurde de l’idée que « ça ne sert à rien » l. 9 à l’idée que « ces choses serviront » l. 11 → folie du désespoir.
- Folie de la mère qui sait que ses barrages ne serviront à rien (l. 22) mais qui veut tout de même les faire, pour sauvegarder l’espoir, donc la vie.
- l’obsession des barrages remplacée par l’obsession de l’assassinat : « assassiner les trois agents du cadastre de Kam »l.31, « vous faire assassiner » l.36, « vos cadavres » l.45, « méprisables cadavres des trois agents cadastraux de Kam » l.52 = cercle mortifère

II. d’une femme qui a encore l’énergie de se révolter

A. Un ton polémique et irrévérencieux
*Mépris :
- Interjection « ah ! » + « les gens de votre espèce » l.23 + passage à la 3ème personne : « ils » pour parler à son interlocuteur = mépris
- « votre ignominie » l. 14 : terme martelé tout au long de la lettre (= déshonneur, honte extrême due à un outrage) + « méprisables » l. 51
- la restrictive « ne ... que » dans « ils n’ont que de l’ambition » l.25 marque le mépris de la mère à l’égard de ces gens : ils ne risquent rien puisqu’ils « ne ratent jamais leur coup », au contraire de la mère qui, elle, a tout risqué et tout perdu.
- adjectif « méprisables » l.51 pour qualifier les potentiels cadavres des agents.
*Colère et indignation :
- Accusation explicite : « vous êtes des voleurs » l. 41 + hyperbole « vos poches déjà alourdies d’or » l. 40
- Questions rhétoriques l. 37 à 40 : marquent l’indignation
*ironie désespérée : décalage menace de mort et formule de politesse finale ; mettez-vous à ma place : vous faire assassiner ; aphorisme : « quand on n’a rien à se mettre sous la dent, on n’est pas difficile » ; son accusation frontale : « vous êtes des voleurs »

B. La dénonciation des tous les méfaits des colons
- C.L de l’argent : « argent », « gagné », « économisé », « sou par sou », « or » → son argent à elle est passé dans les poches des agents du cadastre = accusation de corruption.
- opposition « sou par sou » / « vos poches déjà alourdies d’or » : elle a travaillé dur pour gagner ce pécule, ils sont déjà riches et n’ont pas besoin de son argent.
- métaphores « poches déjà alourdies d’or » + « voleurs » : fait penser à Ali Baba et les 40 voleurs.
- lexique de la mort : « les morts d’enfants », « enterrait » → rappelle l’exploitation ignoble des bagnards + la mort cruelle et injuste des enfants de la plaine.
- Sadisme des colons rappelé implicitement dans l’emploi de l’indéfini « on » : « on enterrait tout vifs les bagnards qui travaillaient à sa construction » l.46
- Avoir ruiné sa jeunesse en vain

C. Le refus du fatalisme, l’espoir à tout prix
- Malgré tout son désespoir, la mère rebondit, ne se laisse pas achever : « insensiblement je commence à espérer » l.10, « c’est ce que je me dis pour me consoler »
- Polyptote (répétition d’un même radical) : « ça commence » l.6, « je commence » l.10, « un commencement » l.14 → nouveau départ ?
- futur de certitude (« ces barrages seront aussi mauvais que les premiers », « je ne les reprendrai jamais ») l.43) + futur proche : (l’année qui vient, la perspective), l.33-34 = elle se projette toujours.
- « faire de nouveaux barrages » l. 21, « acheter cette concession » l. 38, « nouveaux barrages » l.50
- Paradoxe : « cet espoir », que représente « la perspective d’une nouvelle défaite » l. 34 → même la défaite est vue comme un espoir parce qu’alors, la mère aura tenté quelque chose, elle se sera battue jusqu’au bout, elle aura refusé le fatalisme et la passivité.
- Espoir fou d’une réponse de l’agent : « s’il vous plaisait une fois de ma répondre », puis « en espérant quand même une réponse de votre part ».

Plan B 

I. Une femme désespérée

A. Les causes du désespoir : les pertes successives
*La pauvreté :
- C.L de l’argent : « argent », « gagné », « économisé », « sou par sou », « or »
- hyperboles soulignant sa pauvreté : « vraiment très pauvre » l. 1, « tant de misère » l.3
- Pathétique : « l’argent que […] j’avais économisé sou par sou » l. 38
*L’éclatement familial (et surtout la perte du fils) :
- répétition «  mon fils […] va probablement me quitter pour toujours » l. 2-4, « que mon fils s’en aille pour toujours » l. 12, « que je presse mon fils de partir » l. 30 avec une gradation dans son activité à elle : au départ, elle subit le départ du fils, puis elle finit par le provoquer, comme quelque chose d’inévitable.
* Le caractère irrémédiable de ces pertes :
- indications temporelles : adverbe « jamais ») dans une phrase au futur : « je ne les reprendrai jamais » l.43 (en évoquant son argent, sa jeunesse) + « pour toujours » dans « me quitter pour toujours » l.4 et répété l.12 (en évoquant le départ probable de son fils) → pas de retour en arrière possible, perte irrémédiable.
- Lexique de la mort : « les morts d’enfants », « enterrait » = renforce l’aspect irrémédiable de ces pertes.

B. L’aveu de l’absence d’espoir
- La mère dévoilement des sujets intimes : évoque ses enfants (« mon fils » ; « ma fille »), sa souffrance à l’idée du départ de son fils, sa pauvreté, ses insomnies (« je ne peux plus dormir » l.6) → comme si elle parlait à un proche.
- « Voyez-vous » + « mettez-vous à ma place » : formules plutôt d’oralité qui montrent une certaine familiarité entre eux : la mère a besoin d’être comprise (immense solitude?)
- « je ne me sens plus le courage ni le droit » l. 4-5 : accepte (se résigne ?) désormais que ses enfants se désolidarisent.
- Tristesse infinie à l’idée du départ imminent de son fils : intensif « tellement » dans « tellement triste » l.5
- interjection tragique « hélas » l.37
- constat désabusé dans la locution : « il faut bien vivre de quelque chose » l. 48-49 avec le pronom indéfini « quelque chose » qui apparaît comme dérisoire
- expressions d’inutilité : « ça ne sert à rien » l. 9, « à quoi bon ? » l.19, « que me restera-t-il à faire… ? » l.35 → comme si plus rien ne pouvait marcher, comme si la vie n’avait plus qu’à s’arrêter.
- Hypothèse à plusieurs reprises de l’absence d’espoir : « si je n’ai même pas l’espoir » l. 27-28, « si dans l’année qui vient je n’ai même pas cet espoir » l. 33, « si ce n’est pas de l’espoir » l.49
- Ces hypothèses sont suivies de solutions désespérées : « je donne tout de suite ma fille à un bordel » l. 29-30, « je presse mon fils de partir », « je fasse assassiner les trois agents du cadastre » l.31-32 → la mère est prête à renoncer à ce qu’elle a de plus cher au monde, ses enfants, son honneur, sa liberté.

C. La mère ressasse jusqu’à la folie
- Indicateurs temporels : « Ça commence à faire bien longtemps déjà » l. 6-7, « depuis le temps que » l.8
- polyptote « ressasser », « ressasse » l. 8 et 9
- « Je vous le répète » l.48
- des formules répétées : « des nuits et des nuits » l. 7-8 ; « ces choses » répété 3 fois l.8, 11, 13 ; « il faut que vous me donniez ces cinq hectares du haut qui entourent mon bungalow » l. 16, puis « il faut m’accorder ces cinq hectares » l.44-45 ; le nom « barrages » est répété à 5 reprises
- passage absurde de l’idée que « ça ne sert à rien » l. 9 à l’idée que « ces choses serviront » l. 11 → folie du désespoir.
- Folie de la mère qui sait que ses barrages ne serviront à rien (l. 22) mais qui veut tout de même les faire, pour sauvegarder l’espoir, donc la vie.
- l’obsession des barrages remplacée par l’obsession de l’assassinat : « assassiner les trois agents du cadastre de Kam »l.31, « vous faire assassiner » l.36, « vos cadavres » l.45, « méprisables cadavres des trois agents cadastraux de Kam » l.52 = cercle mortifère

II. Mais aussi révoltée

A. Un ton polémique et irrévérencieux
*Mépris :
- Interjection « ah ! » + « les gens de votre espèce » l.23 + passage à la 3ème personne : « ils » pour parler à son interlocuteur = mépris
- « votre ignominie » l. 14 : terme martelé tout au long de la lettre (= déshonneur, honte extrême due à un outrage) + « méprisables » l. 51
- la restrictive « ne ... que » dans « ils n’ont que de l’ambition » l.25 marque le mépris de la mère à l’égard de ces gens : ils ne risquent rien puisqu’ils « ne ratent jamais leur coup », au contraire de la mère qui, elle, a tout risqué et tout perdu.
- adjectif « méprisables » l.51 pour qualifier les potentiels cadavres des agents.
*Colère et indignation :
- Accusation explicite : « vous êtes des voleurs » l. 41 + hyperbole « vos poches déjà alourdies d’or » l. 40
- Questions rhétoriques l. 37 à 40 : marquent l’indignation
*ironie désespérée : décalage menace de mort et formule de politesse finale ; mettez-vous à ma place : vous faire assassiner ; aphorisme : « quand on n’a rien à se mettre sous la dent, on n’est pas difficile » ; son accusation frontale : « vous êtes des voleurs »

B. La dénonciation franche de tous les méfaits des colons
- Quelques expressions familières : « quand on n’a rien à se mettre sous la dent » l. 52-53 ; formule de politesse officielle qui termine la lettre (« je vous prie d’agréer, etc. ») alliée à une restrictive familière (« quand même » l.55) = franchise de la mère qui a un aspect comique
- opposition « sou par sou » / « vos poches déjà alourdies d’or » : elle a travaillé dur pour gagner ce pécule, ils sont déjà riches et n’ont pas besoin de son argent = accusation de corruption (métaphore « poches déjà alourdies d’or » + « voleurs » : fait penser à Ali Baba et les 40 voleurs)
→ rappelle l’exploitation ignoble des bagnards + la mort cruelle et injuste des enfants de la plaine.
- Sadisme des colons rappelé implicitement dans l’emploi de l’indéfini « on » : « on enterrait tout vifs les bagnards qui travaillaient à sa construction » l.46
- Comparaison frappante avec la mort des enfants de la plaine (« de même que les morts d’enfants ne peuvent se reprendre » l. 41 = elle accuse implicitement les blancs d’avoir laissé mourir ces enfants.

C. Le refus du fatalisme, l’espoir à tout prix
- Malgré tout son désespoir, la mère rebondit, ne se laisse pas achever : « insensiblement je commence à espérer » l.10, « c’est ce que je me dis pour me consoler »
- Polyptote (répétition d’un même radical) : « ça commence » l.6, « je commence » l.10, « un commencement » l.14 → nouveau départ ?
- futur de certitude (« ces barrages seront aussi mauvais que les premiers », « je ne les reprendrai jamais ») l.43) + futur proche : (l’année qui vient, la perspective), l.33-34 = elle se projette toujours.
- « faire de nouveaux barrages » l. 21, « acheter cette concession » l. 38, « nouveaux barrages » l.50
- Paradoxe : « cet espoir », que représente « la perspective d’une nouvelle défaite » l. 34 → même la défaite est vue comme un espoir parce qu’alors, la mère aura tenté quelque chose, elle se sera battue jusqu’au bout, elle aura refusé le fatalisme et la passivité.
- Elle imagine un dialogue avec l’agent cadastral : question l.2, dialogue imaginé au discours direct l.18 à 32 : « vous me diriez... » , « je vous répondrais... » : comme si la communication était possible.
- Espoir fou d’une réponse de l’agent : « s’il vous plaisait une fois de ma répondre », puis « en espérant quand même une réponse de votre part ».


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